Dérive...
Dérive. Comment redonner, retrouver un sens à ma vie, sinon celui de m'acheminer vers la mort physique ? Comment participer, sinon passivement, à l'acte du vivant ?
Dérive. J'ai déjà quitté une rive sans avoir atteint l'autre, je suis dans l'océan des possibles sans aucun cap fixe, sans aucune direction, sans gouvernail, soumis aux courants marins et aux vents changeants du psychisme.
Dérive. Mon esquif est vide, mon coeur exsangue, mon corps mort à l'illusion éphémère de lui-même, atomisé dans l'infini, forme informée de sa formation, de sa transformation, véhicule transitoire 'conduisant', servant de conduit à l'Energie-source, d'elle-même à elle-même, en passant par les fleuves et l'océan.
Dérive. Simple parcours de régénération, génération après génération, épuration, transmission, disparition. « Conception-conservation-destruction ». Restructuration, creuset d'éternité, relative, mais ô combien réelle !
Dérive. Se rendre compte que l'on est rien, rien du tout, mais qu'à travers ce rien nous expérimentons et participons au Tout que nous sommes et qui est nous.
Dérive. Retrouver, redécouvrir la joie simple de ce déplacement qui n'est là que pour la grâce et qui n'a ni début ni fin, qui n'a d'autre but que cela, qu'être, même si absurdement dérivant, défilant, s'inscrivant dans un paysage qui s'efface à mesure qu'il se déroule, rien derrière, rien devant, le fil du rasoir du présent.
Dérive. Demain n'existera jamais, hier n'a jamais existé, la mémoire est un leurre, une illusion mentale. Si l'on se rappelle vraiment, nous ne sommes rien que l'Etre et rien d'autre que l'Etre n'est...
Et ce discours est vain.
C'est l'histoire de la main qui tenait le stylo qui dessinait la main qui tenait le stylo qui dessinait la main qui....
Dérive...
Plume.